«Et toi ? Si je vous demande de jouer votre maison sur le vainqueur potentiel, qui allez-vous le mettre? »Mercredi devant la presse, Yannick Bru a posé la question alors que nous lançons une blague et un défi, mais derrière la ligne ironique, le directeur de l’Union Bordeaux-Bègles a parfaitement mis le décor de cette demi-finale des champions de la Coupe.
Ce dimanche (16 h), son équipe apparaîtra dans Simple Outsider lors de cette réunion, dont le stade Toulouse est le grand favori. Racks, expérience, talent, profondeur de la main-d’œuvre, dynamique récente: lorsque les composantes de cette confrontation sont examinées, il est difficile de ne pas placer les partisans du trophée sur un piédestal.
Mais il est impossible d’ignorer également cette petite voix qui vous indique que l’UBB a une carte à jouer, qu’il peut y avoir une brèche dans le mur des certitudes de Toulouse et que les attaquants de Bordeaux parviendront à le trouver. Nous vous accordons, ce défaut dans le plastron n’est pas facile à identifier.
L’UBB pourra-t-il forcer sa nature, varier son rugby, tenir l’épreuve de force que les attaquants de Toulouse lui imposeront?
Depuis la fin janvier, les Toulousains ont survécu dans le top 14. Ils ont fait progresser la moyenne folle de quatre points par match. Ils sont allés gagner au Stade Français (21-27) puis ont écrasé Castres (52-6) avec des équipes rajeunies, permettant à leurs cadres de souffler. Bien sûr, ils ont perdu sur leur chemin Antoine Dupont, qui est tombé avec les Blues lors du tournoi des Six-Nations. Le Scottish Blair Kinghorn a été frappé contre Castres, Peato Mauvaka a laissé un genou cette semaine à l’entraînement et Thomas Ramos, frappé dans un veau, a dû abandonner à son tour. Il n’est pas neutre et nous appuyons que ces blessures à long terme peseront dans le temps d’argent de la saison.
Inconstance problématique
Mais si Maxime Lucu et ses camarades doivent chercher des raisons pour espérer renverser la table, ce n’est pas dans ces absences de marque mais au fond, dans la qualité du rugby qu’ils ont parfois produit cette saison.
En termes d’engagement, leur victoire à Ernest-Wallon (12-16) en septembre, la première de l’histoire du club, reste une référence. Du point de vue du jeu, leur première mi-temps contre Toulouse en mars dernier était un modèle. Engagement, vitesse d’exécution, disponibilité, il y avait tout au cours de ces quarante minutes (29-0), hélas suivi d’un deuxième acte beaucoup moins convaincant devant «l’équipe B» du rouge et du noir (score final: 32-24).
Louis Bielle-Biarrey’s test against Toulouse in March.
Romain Perrocheau / AFP
Cette propension ennuyeuse à s’effondrer, à perdre la cohérence dans l’attaque comme en défense, à affaiblir les phases de la conquête et de combat, c’est malheureusement l’un des fils rouges de la saison UBB dès que son adversaire se remet dans le petit périmètre, sur “Basic, Brutal”. La défaite a concédé dimanche dernier contre les Rochelais (10-21) a été l’illustration parfaite.
Comme Matthieu Jalibert, son emblème de talent mais aussi un inconstance, l’UBB pourra-t-il forcer sa nature, faire varier son rugby, tenir la confrontation que les attaquants de Toulouse lui imposeront en jeu direct vers une passe, sur les Mauls ou en mêlée? Si elle réussit, il est autorisé à rêver. Parce qu’il est sans aucun doute le seul en France capable de mettre le Toulouse en difficulté dans leur entreprise: vitesse, capacité d’exploiter les balles de récupération. Mais de là pour jouer sa maison…