
Il a été placé en orbite mardi matin par la petite fusée italienne Vega-C, lancée par Arianespace depuis la base spatiale de Kourou, en Guyane. Le satellite scientifique de la biomasse de l’Agence spatiale européenne se présente comme une véritable rupture technologique dans la science de l’observation de la Terre.
La biomasse est en effet le premier satellite équipé d’un radar à haute longueur d’onde, capable de pénétrer la canopée forestière pour mesurer la «biomasse» – les troncs, les branches et les tiges ligneuses, où les arbres stockent la majeure partie de leur carbone.
20 minutes A demandé à Dominique Gilliéron, chefs d’observation de la Terre à l’ESA, pour nous parler de ce programme révolutionnaire.
Comment a été le lancement du satellite de biomasse par la fusée Vega-C?
La précision de la fusée Vega-C était remarquable car elle a placé le satellite sur son orbite idéale, située à 666 km de la terre. Ceci est très important pour sa longévité, car la quantité d’ergol pour la propulsion du satellite est limitée, et nous n’avons donc pas à le consommer trop dès le début pour le déplacer. Depuis la nuit du mardi au mercredi, nous vérifions que le satellite a parfaitement survécu au lancement, sachant qu’il s’agit d’un événement assez traumatisant au cours de laquelle il est extrêmement ébranlé. Nous avons d’abord vérifié s’il communique avec le sol, ce qui est le cas, alors s’il déploie ses panneaux solaires et s’il a de l’électricité, ce qui s’est bien passé aussi, et enfin s’il est stabilisé, ce qui est fait. La prochaine grande étape, qui durera les huit jours, est le déploiement de son énorme parapluie [un réflecteur de 12 mètres de diamètre]Ce qui se fera peu par petit, car c’est une opération très sensible.
La biomasse a été conçue pour fournir des informations sur le rôle des forêts dans le cycle du carbone terrestre. Concrètement, qu’est-ce que cela signifie?
Le but de la mission est de mesurer avec précision la quantité de carbone séquestré dans les forêts tropicales, car nous avons entre 10 et 20% des incertitudes sur cette quantité. Lorsque nous savons que les forêts représentent environ 8 milliards de tonnes de carbone séquestré par an, dont 45% par les forêts tropicales, cette différence peut avoir un impact sur les modèles de prévision à long terme du climat.
De plus, nous voulons déterminer les conséquences de la déforestation sur ces gigantesques puits de carbone, et comment ces forêts évoluent grâce au changement climatique. L’évolution des températures et des précipitations augmente les quantités de CO2.
Pourquoi la mission observe-t-elle uniquement les forêts tropicales?
Pour un grand nombre de forêts, en particulier celles qui sont à nos latitudes, des mesures sont déjà prises via d’autres satellites, tels que Sentinel 1 et 2. Il existe également toute une série de contrôles au sol, ainsi qu’en France par le National Forest Office. Le problème des forêts tropicales est que ce sont des forêts avec un feuillage dense, à travers lequel les systèmes actuels ne voient pas. Cependant, seulement 1% du carbone est kidnappé dans le feuillage, vous devez donc aller voir ci-dessous. Nous pourrions y aller pour mesurer cela, mais nous parlons d’une surface absolument gigantesque, dans des zones infructueuses… nous sommes donc obligés de le faire depuis l’espace pour avoir une vision mondiale, et avec un nouveau type de satellite, ce qui est le cas avec ce radar pénétrant qui est un monde pour le premier à regarder la terre.
Qu’est-ce qui est si spécial?
Ce qui est unique, c’est qu’il s’agit d’un satellite radar dans une bande P, ce qui signifie une très longue longueur d’onde, qui sera sensible aux objets de dimension de 70 cm, mais qui ignorera tout ce qui est plus petit. Alors il ne voit pas [ou peu] Le feuillage, il le traverse, pour mesurer directement les branches et les troncs des arbres, dans des zones d’environ 200 mètres sur 200 mètres. Ce sont les mesures qui déduiront les capacités de stockage du carbone.
Comment la mission aura-t-elle lieu et combien de temps durera-t-elle?
Nous devons obtenir notre première image radar en un mois, puis nous entrons dans une phase d’étalonnage, avec une série de mesures autour de 50 sites de test distribués dans le monde, pour être sûr que notre satellite restaure les bonnes valeurs. Après six mois, nous pouvons commencer à fournir les premières données validées aux scientifiques des premières forêts tropicales. La mission est calibrée pour durer cinq ans, mais nous pouvons sans aucun doute l’étendre pendant quelques années.
Le satellite ne mesurera pas seulement les forêts pendant cette période, mais sera également intéressée par d’autres environnements, que faire?
Oui, ce seront les missions secondaires de ce programme scientifique, qui observera les sous-sols des déserts secs, jusqu’à cinq mètres de profondeur. Cela intéressera les géologues et les archéologues, car nous pourrions détecter sous le sable des vieilles villes aujourd’hui enterrées. Il peut également pénétrer à environ 40 à 50 mètres dans la glace, ce qui est important pour mesurer la fusion de la calotte glaciaire.
Combien de temps a-t-il fallu pour réaliser ce projet?
Nous parlons depuis des décennies. Le premier concept scientifique a été formulé avant les années 2000, mais les technologies pour fabriquer un satellite de cette classe n’étaient alors pas disponibles. Ce n’est qu’à partir de 2013 que l’ESA et ses États membres ont décidé de transformer ces études en mission scientifique. Les laboratoires français tels que CESBIO (Centre d’études spatiales de la biosphère) de l’Université de Toulouse, en anglais, ont travaillé sur ce projet, puis cinquante fabricants européens ont travaillé sur la conception du satellite.
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C’est vraiment un projet européen, ce type de missions serait impossible à réaliser pour un seul pays. Et c’est l’objectif de l’Agence spatiale européenne, de faire progresser la science dans le domaine de l’observation de la Terre, d’avoir des données sur l’évolution de la planète, qui est absolument cruciale pour se préparer pour l’avenir.