Audace spirituelle
Le premier est celui de la force spirituelle. Nous pouvons retourner ce qui a été dit des derniers conclaves dans toutes les directions, c’est d’abord l’audace et la couleur spirituelle d’un cardinal qui convainc ses collègues de voter pour lui. Les autres questions: est-ce bon polyglot, d’où vient-il, quelles sont ses compétences diplomatiques, connaît-il la curie… ?, sont des questions importantes mais secondaires. Quoi que nous pensons de leur évaluation finale, les derniers papes se sont également distingués par leur spiritualité respective. Il suffit de penser au «n’ayez pas peur» de Jean-Paul II, de la belle théologie de Benoît XVI, ou du pape François, s’accroupissant devant un bassin, lavant les pieds de prisonniers de Rome.
La grande peur de l’Église, selon les mots de ses papes, doit être réduite à une «ONG avec des valeurs horizontales»; Elle aime se rappeler que son origine, dans ses yeux, est en Dieu. La question spirituelle du prochain pontificat sera donc cruciale, d’autant plus à un moment où les dirigeants améliorent le catholicisme à des fins d’identité.
S’il est donc important d’analyser l’approche politique, idéologique et diplomatique d’un pape, la clé principale pour comprendre un pontificat reste la sensibilité spirituelle du souverain. Avant d’être à gauche au niveau économique et social et les conservateurs sur le terrain éthique, François était jésuite. Le jour de la fumée blanche, telle devrait être la première question à poser.
De la force à la prudence
Lorsque nous regardons les vertus cardinales conservées par l’Église (prudence, force, tempérance et justice), il peut être écrit que le pontificat de François était celui de la force. Sa gouvernance était ferme. C’est pourquoi il a été élu, après Benoît XVI, incapable d’un tel gouvernement. À François, après avoir écouté, est venu le moment d’une décision solitaire, irrévocable et parfois difficile. Au sein de la curie (le gouvernement de l’Église) et du monde catholique, il pourrait frapper. Ajoutons qu’au-delà de l’église, au niveau diplomatique ou éthique, le pape, soucieux de secouer les consciences, a adoré les petites sentences à couper le souffle qui ont également suscité la confusion (pensez à «Aboyage de l’OTAN à la porte de la Russie» mentionné en mai 2022, ou son regret récurrent de voir les familles «Préférant avoir un chat ou un chien ce petit enfant»). Pour apaiser l’Église et ses diverses sensibilités et pour assurer la voix diplomatique du Vatican, il n’est pas impossible que les cardinaux fassent le choix soit de la force, mais de la prudence. Cette vertu, «ne confonde ni avec la timidité ni la peur», dit le catéchisme catholique, mais permet de rassembler tout le monde autour de la même table. Ce sera un atout essentiel pour le prochain pape.
Autonomie et unité
Va enfin la conscience de l’universalité. Avec la mondialisation, le pontife souverain n’incarne plus uniquement le pôle spirituel de l’Occident, il est devenu un prêtre planétaire qui doit faire l’unité de tous les continents. Exercice délicat auquel François s’est affronté, en particulier autour de la question de la bénédiction des couples homosexuels. Préoccupé par la collégialité (ou la synodalité dans le jargon), le pape argentin a toujours souhaité décentraliser le pouvoir romain et offrir plus d’autonomie aux épiscopats locaux. Cette ambition a été soutenue par beaucoup, car de nombreux cardinaux considèrent que c’est une question urgente pour l’église. Mais elle a également éveillé les préoccupations: comment faire en sorte que cette décentralisation ne sape pas l’unité de l’Église? Le point d’équilibre n’a pas encore été trouvé. Le futur pape sera sans aucun doute celui qui a pu éclairer ses collègues sur cette question.